Faire des contrats d’assurance des outils de financement de l’adaptation
Article extrait de notre étude : « Assurance & post-croissance : comment protéger à l’aune des limites planétaires ? »
La question de la pertinence de la remise à neuf d’un actif à la suite d’un sinistre se pose lorsque celui-ci se révèle très vulnérable aux futures catastrophes naturelles.
Le moment de la reconstruction devient alors le moment propice pour réparer mais aussi adapter les constructions au climat futur, et ainsi réduire la vulnérabilité. Des expérimentations pour améliorer la résilience du bâti lors de sa réparation commencent à voir le jour, et soulignent la continuité nécessaire des démarches de prévention, tout au long de la vie du bâtiment, pour faire face aux catastrophes naturelles futures.
Le Build Back Better : un dispositif d’adaptation par la reconstruction
La reconstruction : un moment privilégié pour adapter
Les travaux d’adaptation des logements se révèlent souvent invasifs, avec une perception peu immédiate de leur bénéfice par les habitants. Puisque le parc immobilier français ne se renouvelle qu’à hauteur de 0,15 % par an (cf. article sur le risque sécheresse, p. 44), le temps de la reconstruction après un sinistre apparaît comme un moment privilégié pour adapter les logements aux nouvelles conditions climatiques tout en les reconstruisant, et ainsi réduire les coûts de la rénovation.
Comme l’indique le Cadre d’action de Sendai de l’ONU, « l’expérience des catastrophes passées a montré que la phase de relèvement, de remise en état et de reconstruction doit être préparée en amont et qu’elle est une occasion cruciale de ’mieux reconstruire’, notamment en intégrant la réduction des risques de catastrophe dans les mesures de développement » (United Nations International Strategy for Disaster Reduction, 2015). En effet, le contexte d’urgence propre à la reconstruction se caractérise par une priorité à « recouvrer » l’usage du bien (Crozier et al., 2016). Si les améliorations possibles du bâti n’ont pas été identifiées en amont, les travaux d’adaptation risquent d’être abandonnés au profit d’une reconstruction à l’identique, plus rapide.
La reconstruction est ainsi un moment privilégié pour les travaux d’adaptation car elle :
- intervient après le sinistre, qui a pu provoquer une conscience aigüe du risque ;
- concentre les efforts de prévention, via « la délimitation d’un territoire circonscrit […] sur lequel l’action publique est amenée à se concentrer provisoirement » (Crozier et al., 2016) ;
- permet de mutualiser les coûts d’adaptation et les coûts de réparation.
Les mécanismes de build back better (« reconstruire mieux », BBB) cherchent ainsi à tirer parti de la reconstruction pour adapter le logement aux risques futurs et en réduire la vulnérabilité. Ces mécanismes supposent l’existence d’aménagements facilement déployables, capables de réduire significativement la vulnérabilité d’un bâtiment et de s’intégrer à des constructions existantes. C’est le cas notamment pour les risques inondation ou sécheresse, par exemple avec l’installation de batardeaux ou de micropieux, ou pour le risque incendie (portes coupe-feu, matériaux ignifuges, etc.).
L’exemple pionnier de FloodRe ouvre la voie pour les assureurs
Les assureurs, parce qu’ils interviennent au moment de la reconstruction, occupent une position propice à encourager des reconstructions résilientes. Notamment, dans le cadre d’un partenariat avec la puissance publique, à l’instar du dispositif FloodRe expérimenté au Royaume-Uni (cf. encart ci-contre).
Expérimenté pour les inondations, le schéma inauguré par FloodRe pourrait s’appliquer à d’autres risques, en particulier le risque sécheresse en France pour lequel il existe aussi des aménagements susceptibles de réduire significativement la vulnérabilité. Cependant, un tel dispositif doit trouver un modèle économique : selon Thierry Biardeau (Directeur Technique assurance chez Maif), « d’après les premières informations dont nous disposons, la reconstruction selon des normes plus élevées représenterait un surcoût d’environ 20 %. Un coût qui peut varier en fonction des dommages concernés, des normes prises en compte et de l’offre de réparation disponible ».